Février 2024

La rue Saint-Jean sans sa porte, début XXe siècle

Cette photographie, prise au début du XXe siècle, reflète la sérénité d’une belle journée d’hiver, tout en soulignant les grands défis de la modernisation de la Ville de Québec : la Porte Saint-Jean a été détruite (un trou béant perce l’enceinte fortifiée) et les rails et les fils du tramway relient le centre historique et le Faubourg St-Jean. Car l’enjeu principal est la fluidité de circulation entre les quartiers : selon le Rapport annuel de la Ville de Québec de 1853, plusieurs centaines de voitures et des milliers de personnes pouvaient franchir la porte Saint- Jean quotidiennement (J. Hare, M. Lafrance, D.-T. Ruddel, Histoire de la ville de Québec, Boréal, 1987, p. 281). À cette époque, la Porte St-Jean construite sous le régime français, et rénovée vers 1790, était un simple passage voûté percé dans le rempart. Cette porte fut démolie en 1864, pour être remplacée par une porte à quatre arches – deux pour les voitures et deux plus petites pour les piétons – qui fut complétée en 1867. Mais cette solution de compromis n’a subsisté qu’une trentaine d’années : la nouvelle porte a dû être détruite en 1897, en raison de l’implantation du tramway électrique.

Après le départ de la garnison britannique en 1871, de nouvelles portes (non-militaires donc sans dispositif de fermeture) de style « normand », tel que proposé par Lord Dufferin et son architecte William H. Lynn, sont aménagées dans le but d’ouvrir la ville tout en conservant les fortifications. Un projet du même style avait été proposé pour la Porte Saint-Jean, mais l’importance de cet accès à la ville intra-muros avait déjà changé la donne. Ainsi, le site photographié montre mieux que toute autre porte l’impact de la vie moderne sur le Vieux-Québec : la brèche créée en 1897 est restée ouverte jusqu’en 1939, date où la porte actuelle a été érigée. On aperçoit à droite, la nouvelle façade d’un bâtiment dont les 15 premiers pieds avaient dû être amputés pour élargir la rue en 1889; de l’autre côté trône l’édifice de la Jacques Cartier Water & Power Cie, construit en 1901 selon les plans de Berlinguet et Lemay, avec ses grandes ouvertures rendues possibles par une structure d’acier. (Marc Grignon)

Photographie : BAnQ, fonds Literary and Historical Society of Quebec, P450D1-054.


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